Google, oecuménisme et convergence : de la fascination à... l'inquiétude ?

A l'heure où les entreprises mettent la dernière touche à leurs bilans et décident de ce qu'elles feront en 2006, un retour sur les orientations choisies par le numéro un des moteurs de recherche - j'ai nommé l'hégémonique Google - s'impose.

En décembre dernier, les analystes s'accordaient tous plus ou moins à dire que 2004 pouvait être qualifiée d'année Google. Je reconduirais volontiers ce titre pour 2005 : sur les douze derniers mois, pas un jour sans qu'un blogueur ne disserte sur le phénomène Google, pas une semaine sans qu'un dossier ne lui soit consacré, pas un mois sans qu'un projet novateur ne soit lancé. Constat ? Désormais, Google ne fascine plus. Il fait peur.

Et 2006 ? Google s'arrogera-t-il l'année du Web comme les deux années précédentes ? Seul l'avenir nous le dira. Afin de mieux nous y préparer, revenons sur les principaux projets entrepris et les éventuelles perspectives…

  • Organisation de l'information
  • L'œcuménisme selon Google : la convergence des applications
  • Vers un Web plus fort que le Web ?

Nous organiserons l'information mondiale !

Sur certains points, Google ouvre la voie. Sur d'autres, il n'est que suiveur. Dans tous les cas, ses ingénieurs travaillent bien et en 2005, l'accent a été mis sur des pans de l'information restés plus ou moins à l'écart : vidéos, livres ou "inclassables". Avec, à chaque fois, un lucratif business à la clé.

Vidéo : grâce à quelques accords passés avec ceux qui produisent les contenus, Google est un diffuseur en puissance. Pour le moment, son service de vidéo ne propose qu'un amas hétéroclite de petits clips, mais derrière se dessine un projet plus ambitieux, ce dont le moteur ne se cache pas. Un investissement en vue ? Nul ne sait, mais le marché naissant de la vidéo à la demande est prometteur et Google le sait.

Livre : inauguré en juin, victime de nombreux contretemps, le projet Google Print, récemment rebaptisé Book Search, est l'un des plus ambitieux conduit par le moteur. Je ne reviendrai pas sur les enjeux, d'autres l'ont fait, mais je rappellerai juste que là encore, le potentiel d'une telle "bibliothèque virtuelle" est énorme. Sinon, pourquoi Yahoo! ou Microsoft lui auraient-ils emboîté le pas ?

Inclassables : les américain les appellent les "classifieds" et ces dernières représentent aux Etats-Unis une part conséquente du commerce en ligne. Depuis peu, Google les classe, justement, mais le service lancé à cette fin est inclassable : une gigantesque base de données ouverte à tous, un fourre-tout numérique vaguement organisé. A peine Google Base sorti que le cours en bourse d'eBay s'effrite. Le potentiel ? Je vous laisse en juger…

Google, ou l'art de la convergence

2006 devrait être l'année au cours de laquelle les différentes stratégies élaborées par Google se rejoindront. Pour ce faire, pour s'assurer une place à la fois en amont et en aval de la circulation de l'information, Google se prépare : fourniture d'accès à Internet à San Francisco, investissements dans le courant porteur en ligne ou partenariats avec de grands opérateurs… chaque maillon de la chaîne doit transiter, d'une façon ou d'une autre, par Mountain View.

Le commerce en ligne est actuellement le domaine dans lequel la stratégie de convergence de Google se dessine le mieux : mise en relation par téléphone (Click to call), géolocalisation (Google Earth, Google Maps, associés au comparateur de prix Froogle ou à Google Base), outils de statistiques (Google Analytics), etc. Tous les services mis au point par Google visent à lui assurer une place dans chaque échange pouvant déboucher sur une éventuelle transaction. Et, accessoirement, à lui permettre de placer ses lucratives annonces publicitaires via l'incontournable Google AdWords.

A terme, une fois Google Talk ouvert à la téléphonie sur IP, on voit mal comment commercer sans Google ! L'internaute utilise le moteur de recherche, le comparateur, les services de localisation ou les publicités pour choisir chez qui effectuer ses achats. Le commerçant use de Google pour placer ses annonces, surveiller la fréquentation de son site ou permettre à ses clients d'entrer en relation avec lui. Bien sûr, des concurrents existent dans chacun de ces domaines. Mais qui parmi eux propose une gamme de service aussi étendue ?

Vers un Web plus fort que le Web ?

Quelque soit l'appellation choisie pour qualifier l'avenir du Web, un avenir dans lequel l'internaute ne sera plus simple spectateur mais acteur et créateur de contenu, Google sera l'un des moteur de la mutation.

Il ne sera certainement pas le seul, comme le montrent les actuels efforts de Microsoft ou de Yahoo! pour s'imposer dans ce secteur. Certaines des surprises que nous réserve le Web 2.0 comme on l'appelle viendront pourtant à coup sûr de Google.

Les hypothèses vont bon train, au premier rang desquelles la suivante : le partenariat récemment annoncé avec Sun serait-il le signe que Google prépare un système d'exploitation basé en ligne, qui lui permettrait de fédérer tous ses services au sein d'un seul et même point d'accès incontournable ?

Les rumeurs veulent également que Google ait des vues sur le marché des navigateurs, là encore dans le but de proposer un point d'entrée unique à ses services, étape suprême de la convergence de ces derniers. Opera ne serait finalement pas à vendre, du moins pour le moment, mais il est avéré que le navigateur entretient d'excellentes relations de longue date avec la fondation Mozilla, éditrice du célèbre Firefox…

Les applications se déplacent du disque dur vers le Web, le phénomène est désormais évident. Toolbar ou Desktop Search ne sont vraisemblablement que les premières incursions de Google dans le domaine de l'applicatif. Convergence et compatibilité devraient être les maîtres mots des futurs projets du moteur de recherche en la matière.

L'image de start-up innovante, fascinante de par la vivacité d'esprit de ses fondateurs, est en train de s'éteindre. Google ne fait plus rêver : maintenant, il inquiète.

Note : ce billet est paru dans la rubrique "à la Une" d'Agoravox le 19 décembre.

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